LA DÉMISSION
1. PRINCIPES ESSENTIELS
La partie qui invoque les circonstances d'un fait doit en rapporter la preuve...
la démission ne se présume pas : l'employeur, qui " prétend " pouvoir prendre acte d'une éventuelle démission, s'expose à une requalification en licenciement,
le salarié, qui demande la requalification de sa démission initiale en licenciement, supporte la charge d'exposer des errements de l'employeur.
En présence de la lettre d'un l'employeur, qui a pris acte d'une démission résultant de causes énoncées, la rupture doit certes s'analyser en licenciement, MAIS il appartient aux juges
d'examiner les motifs ainsi énoncés dans cette lettre...
et de pouvoir alors estimer qu'il y avait bien eu faute grave.
Seule la démonstration du caractère abusif d'une démission ouvre droit à une réparation au bénéfice de l'employeur.
En cas de controverse où les parties ne contestent pas la fin de leur relation, mais se limitent à s'en rejeter réciproquement la responsabilité, les juges du fond sont tenus de désigner l'auteur de la rupture.
2. MANIFESTATION DE LA VOLONTÉ
a. claire et non équivoque
La lettre ou la déclaration orale, ou le comportement adopté, doit démontrer (sans ambiguïté) que le salarié est l'auteur volontaire de la rupture...
ce qui est bien le cas d'un salarié ayant pu s'entretenir avec diverses personnes et disposer d'un temps de réflexion !
ce qui n'est pas le cas d'un salarié ayant transmis, dès le lendemain, un avis médical d'arrêt de travail.
b. LIBRE
L'acte doit émaner d'un individu sain d'esprit, ne subissant aucune menace. Le salarié incarcéré n'est pas démissionnaire.
c. DÉFINITIVE
Le salarié peut se rétracter, rapidement, en termes précis... (la jurisprudence porte sur une abondante variété de situations, dont le point commun semble être : le salarié qui rédige sa lettre de démission sans conscience de son comportement prive cette lettre de toute portée).
3. COMPORTEMENT DU SALARIE
a. absence injustifiée
Si l'absence irrégulière peut donner matière à une sanction, voire à un licenciement, elle ne caractérise pas une volonté explicite de mettre fin au contrat.
b. attitude au travail
Le refus d'obéissance, qui peut amener l'employeur à invoquer une faute grave, n'établit pas l'intention de démissionner.
c. demande exprimée par le salarié
Le salarié, qui invite son employeur à mettre en oeuvre une procédure de licenciement, n'est pas démissionnaire (l'employeur n'est pas davantage tenu d'accepter).
Celui qui revendique la révision de sa situation (par exemple : sur une classification) et annonce qu'il ne reprendra pas le travail, tant que dureront les conditions actuelles, n'exprime pas une volonté claire de démissionner.
d. refus de modification substantielle
Même le refus de la modification d'une clause, souverainement appréciée comme non substantielle par les juges du contrat, ne fait pas ressortir la manifestation d'une volonté claire de démissionner.
e. imputabilité de la rupture
Le salarié, qui saisit le Conseil de prud'hommes sur l'imputabilité d'une rupture par la prise d'acte d'un manquement de l'employeur à une obligation essentielle du contrat et qui échoue dans cette tentative, n'a pas pour autant exposé de ce seul fait une intention de démissionner ;
par contre, celui qui a cru utile de :
s'inscrire comme demandeur d'emploi,
ou se mettre au service d'un tiers...
démontre ainsi qu'il a finalement pris l'initiative de la rupture, qui s'analyse bien alors en démission.
4. COMPORTEMENT DE L'EMPLOYEUR
a. violence
Une altercation, une attitude vexatoire, etc., de l'employeur ou d'un membre de sa famille ou de la hiérarchie, permettant de caractériser une provocation, rendent impossible le maintien du salarié dans l'entreprise et lui permettent, dans un contexte ainsi avéré, d'établir l'existence d'un licenciement.
b. inexécution des obligations patronales
La faute de l'employeur, résultant du non paiement régulier de tout ou partie conséquente de la rémunération, lui rend imputable les circonstances du départ du salarié.
c. violation de dispositions d'ordre public
Confronté au refus formel d'une société de le maintenir dans son emploi, un salarié peut, tout en entrant au service d'un autre employeur, démontrer qu'il a été victime d'une collusion frauduleuse visant à échapper à l'article L.122-12.